Une ombre svelte et silencieuse marchait dans un long couloir désert sous l'oeil attentif de vieux tableaux, des portraits de famille, recouverts de poussière. Une grande demeure un peu à l'écart de la belle ville de Londres semblait presque à l'abandon mais réussissait à garder toute sa splendeur. Elle était impénétrable grâce au grand portail de fer qui protégeait l'immense jardin constamment taillé par un jardinier professionnel dans lequel plus aucun enfant ne jouait. On pouvait d'ailleurs voir dans la cours de graviers blancs une moto à l'abri sous un arbre. En effet la pluie fine tombait silencieusement sur les vieilles fenêtres, peu de lumière pouvait entrer à cause du ciel gris qui recouvrait tout le pays. Le paysage semblait si triste et démotivant... Mais beaucoup de londoniens finissaient par avoir l'habitude de ce décor grisâtre et plus rien ne pouvait normalement faire perdre le sourire aux gens. Sauf à cette famille si connue dont on disait n'avoir jamais vu le sourire, le fils héritier était le pire de tous, les rumeurs allaient de bon vent sur son sujet. Dans ce même couloir, il n'y avait pas un bruit qui pouvait être signe d'une quelconque présence autre que cette ombre, seuls ses pas rapides mais réguliers résonnaient avant de mourir lentement en un écho sombre. Les deux yeux couleur émeraude de l'homme, car s'en était un, semblaient briller d'une lueur de colère alors qu'il se dirigeait rapidement vers une grande porte d'ébène richement ornée. Il poussa violemment la porte qui alla claquer contre le mur et fusilla du regard un homme plutôt âgé, brun, qui se tenait courbé sur un bureau couvert de dossiers en tout genre. Il avait sursauté et tremblait de peur à la venue du jeune homme, il n'osait pas dire quoi que ce soit pourtant c'était bien son fils en face de lui, il ne pouvait pas se laisser se faire écraser ainsi par un simple regard. Le jeune homme se tenait droit comme un I et le surpassait de toute sa taille, il s'approcha avec une extrême lenteur du vieux bureau, chacun de ses gestes semblaient exagérés et le vieil homme tremblait de plus en plus. Lorsqu'il fut assez proche, il donna un violent coup de poing sur le bois du meuble et se pencha sur son père avant de dire sèchement :

"Puis-je savoir pourquoi mon nom se trouve dans la liste d'une université que je n'ai guère demandé? Vous savez pourtant que j'ai d'autres choses à faire que me retrouver en compagnie de sales rats qui ne méritent pas de poser les yeux sur moi."

"Steve... C'est... C'est juste pour que tu puisses mieux contrôler cette... Cette chose en toi et..."

"Silence!"

Il avait une nouvelle fois donné un coup de poing sur la table en faisant trembler d'avantage son père. Il était hors de question qu'il se retrouve dans cette université pour 'élèves spéciaux' car il voulait apprendre à contrôler son pouvoir seul, il n'avait besoin de personne d'autre pour cela. Rien ne pourrait plus le mettre en colère que le forcer à se mêler à la foule si... Si Banale! Il n'était pas comme tout le monde, c'était un déshonneur pour lui que de s'abaisser à leur niveau. Son père mit de nombreux jours avant de le 'convaincre', il le supplia de nombreuses fois avant qu'il ne daigne accepter de s'y rendre. Le voyage était prévu le vendredi soir, très tard pour être sûr que leur voiture ne soit pas suivie jusqu'à l'aéroport. Il devait arriver sur les lieux le lendemain matin, lui laissant ainsi le temps d'arriver et poser ses valises. Dans la limousine noire aux vitres teintées, il ne cessait de lancer des regards furieux à ceux qu'il devait malgré tout considérer comme ses géniteurs. Le vieil homme brun tenait la main d'une femme blonde aux traits fins, également âgée mais sans perdre la moindre beauté, comme si cela était une preuve d'amour. Cela était écœurant, ils pouvaient s'amuser à tromper les autres mais ça ne marchait pas avec Steve. A peine la voiture se fut elle arrêtée qu'il ouvrit la porte et claqua des doigts pour ordonner à ce que l'on descende ses valises sans dire quoi que ce soit à ses parents. Il ne leur accorda même pas le moindre regard alors qu'il montait dans l'avion privé et se glissa à ses aises dans un siège de cuir. Une jolie jeune femme s'approcha de lui pour lui proposer un verre mais son regard glacé lui fit vite comprendre qu'il n'était pas d'humeur. Il mit des écouteurs dans ses oreilles et ferma les yeux, le lendemain serait un nouveau jour...

*********

Le jeune anglais passa le grand portail de fer qu'il annonçait fièrement le nom de l'université... Gartron... Quel nom étrange. En tout cas il devait avouer que le décor que lui offrait l'établissement était magnifique, c'était plaisant et cela lui changeait du ciel grisâtre de Londres. Il commença à avancer sur les graviers alors qu'un homme à côté de lui portait ses valises avec difficulté, il claqua ses doigts, pas la peine de dire quoi que ce soit car il savait exactement ce qu'il avait à faire et tandis que le domestique se dirigeait vers ce qui semblait être les dortoirs pour y déposer ses affaires, il prit tranquillement la direction du parc, impossible pour le jeune homme de se priver de la nature, il se sentait toujours plus à l'aise quand il était entouré de plantes. Il regardait autour de lui avec attention, rien n'échappait à son regard émeraude alors qu'il mettait une paire de lunettes de soleil, la lumière commençant à le gêner. Le jour s'était levé depuis longtemps déjà quand il s'installa sur un banc pour profiter du spectacle de l'éveil de la nature, regardant les fleurs s'ouvrir les unes après les autres selon leur nature. Il cueillit du bout des doigts une rose qui sembla soudain plus vivante encore et plus belle à son simple contact. Ce jardin était de toute beauté mais ne semblait pas bénéficier d'un jardinier professionnel ou autre chose du même genre, c'était dommage. Il effleura une autre fleur qui fanait sans que personne ne s'en rende compte, Steve avait parfois l'impression de leur parler, et celle-ci retrouva toute sa vigueur alors qu'il prenait ses aises sur le banc, croisant les bras. Remettant correctement les lunettes qui avaient bougé, il s'étira lentement quand soudain il crut entendre des pas dans sa direction. Soupirant, il dit pour lui-même en se moquant royalement de savoir si on l'entendrait ou pas :

"Tiens donc, des insectes s'amusent à se promener dans ce parc... Il faudrait faire quelque chose pour éliminer toute cette vermine..."

Il fit craquer ses doigts dans un bruit sinistre qui ne le gênait point et se leva avec lenteur, exagérant chacun de ses gestes de manière théâtrale et regarda autour de lui pour voir d'où venait exactement la personne et, croisant une nouveau les bras, continua :

"Il me tarde de quitter ce lieu d'ennui... Les gens ne méritent pas d'avoir un Richard dans cet établissement..."

Steve n'était qu'à peine captivé par le bruit de pas qui venait dans sa direction, en fait il s'en fichait même royalement car il avait trouvé beaucoup plus intéressant lorsqu'il posa les yeux au sol et vit une jeune tulipe couleur sang qui avait réussi à pousser entre le gravier blanc. C'était rare qu'une plante y réussisse et il la contempla comme s'il admirait une douce jeune femme qui cachait en elle la force de tenir face aux intempéries. C'est pour cela qu'il ne jeta aucun regard à la jeune fille qui passa non loin en courant, n'entendant même plus le bruit de sa course, surement en train de faire du sport pour se défouler et ainsi pouvoir mieux supporter cet endroit si fade aux yeux hautains du jeune homme. Ce dernier se pencha d'ailleurs un court instant pour effleurer la fleur du bout des doigts et celle-ci grandit d'avantage pour surplomber toutes les autres fleurs de sa beauté surnaturelle. Il aimait donner la chance à certaines plantes d'en surpasser d'autres car après tout il faisait exactement la même chose avec les gens qu'il laissait s'approcher de lui en silence. C'était un honneur pour eux de pouvoir poser leurs yeux impurs sur un homme tel que lui et cela les faisait en quelque sorte s'élever aux dessus des autres mortels grâce à ce simple privilège. Mais évidemment, le jeune anglais était aussi froid que la glace et peu de personnes osaient réellement croiser son regard émeraude sans craindre sa colère, il n'était après tout pas réputé pour sa patience, bien au contraire. Tenant toujours la rose entre ses doigts fins, il se releva avec la même lenteur exagérée et s'étira une nouvelle fois en soupirant un instant. Il regarda autour de lui et apprécia le vent frais sur son visage alors que celui-ci soufflait doucement, mettant ainsi sa chevelure brune en bataille. Peut-être qu'il pourrait tenir dans cet établissement s'il restait aussi proche de la nature sinon il trouverait un autre moyen de le quitter... Et si on le retenait vraiment, il se savait capable de détruire littéralement tout ce qui se mettrait sur son chemin. Il passa sa main libre dans ses cheveux ébènes quand la même jeune fille que tout à l'heure s'approcha de lui avec un air furieux sur le visage. Il haussa élégamment son sourcil hautain pour la détailler rapidement alors qu'elle osait sans gêne poser ses yeux rouge écarlate sur sa personne. Ce devait être une fille des villes, rien de plus. Elle avait pourtant un physique plutôt singulier de part ses yeux étranges ainsi que sa couleur rousse de ses cheveux mais ses vêtements plus que simples gâchaient cette chose spéciale qui se dégageait en elle. Il se pencha légèrement pour poser ses yeux sur elle, détaillant le jogging sale et dégradant comparé à sa chemise pourpre et son pantalon de soie noir de jais. Il remit son long manteau blanc bien en place sur ses épaules et lui tourna le dos avant de retourner s'asseoir sur le banc, croisant les bras sur son torse :

"Pensez-vous réellement qu'une telle réaction est digne d'une lady? J'en doute fortement, je pensais en voyant un regard si intéressant avoir affaire à une personne ayant une certaine personnalité mais à peine avez-vous entrouvert vos lèvres pour m'adresser la parole que toute cette magie a disparu..."

Il marqua un temps durant lequel il regarda sans aucune gêne la jeune femme de haut en bas avant de lancer la rose étincelante dans sa direction d'un geste ample comme s'il s'attendait à ce qu'elle la rattrape. On pouvait, de part sa manière de parler et son accent anglais fort audible, rapidement comprendre d'où il venait mais aussi à quel statut social il appartenait. Il n'avait pas à s'en cacher après tout, il en était fier. Il se pencha imperceptiblement vers elle alors que la belle rose continuait de tomber en silence.

"Dommage, vous n'avez donc aucune particularité qui aurait pu me divertir et le ton que vous employez en me regardant ne me plait guère."

A peine eut-il terminé sa phrase que la rose en question, bien avant qu'elle ne touche le sol, se mit à pousser et les lianes qui apparurent s'enroulèrent autour du corps de la jeune femme sans prendre garde si la pression qu'il exerçait sur ses côtes était douloureuse ou non. Une fine liane s'approcha de son visage pour se glisser autour de sa gorge, quelques épines pouvant ainsi égratigner la douce peau de la jeune femme sans aucune vergogne alors d'une rose poussait avec lenteur dans ses cheveux. A elle seule elle représentait à présent un de ses chefs-d'oeuvre éphémères, chacune de ses lianes semblaient être des courbes douces faites volontairement. Il se moquait bien de savoir si cela ne la blesse ou non car il n'avait à présent qu'une seule et unique idée en tête alors que ses yeux vert profond lui lançaient un regard dédaigneux, il allait lui faire payer l'affront qu'elle avait eu face à lui en osant s'adresser à sa personne d'une manière aussi sèche et violente. Il n'était après tout pas n'importe qui et elle allait vite comprendre son erreur, il allait lui faire regretter ses paroles venimeuses et la faire plier devant lui, la mettre à genoux. Il se leva une nouvelle fois de son banc et la surplomba de toute sa taille alors qu'il s'approchait d'elle. Les lianes se resserraient doucement autour d'elle en une étreinte empoisonnée à chacun de ses pas, il n'allait pas la laisser partir aussi facilement. Il tendit une main vers elle et lui saisit son menton avec délicatesse malgré tout, mauvais réflexe venant de l'enseignement donné par les pédagogues aux ordres de ses parents, et se pencha lentement vers elle jusqu'à ce que son souffle chaud caresse la peau de son visage.

"Je pense que vous devez ignorer qui je suis alors je vous serais gré de ne plus tenter ce genre d'affront au risque pour vous d'y perdre la vie car je ne suis pas du genre à discuter paisiblement."

Il relâcha son menton et cueillit la rose qui avait poussé avant de la glisser dans la chevelure de feu de la jeune fille et se desserrer légèrement les liens pour lui permettre de respirer convenablement avant de se reculer de quelques pas et de prendre appui à un arbre non loin tandis qu'un souffle frais soufflait de nouveau sur le grand parc fleuri, faisant s'envoler quelques pétales qui égaillèrent le paysage un court instant avant d'aller s'échouer dans les graviers blancs. Il lança un regard glacé à la jeune fille avant de murmurer doucement, par pure curiosité même si il se doutait avoir réellement une réponse après ce genre de gestes:

"Et puis-je tout de même connaître le nom d'une jeune fille aussi effrontée?"

Elle était surprenante, il se devait de l'avouer. Pour une fois, il commençait à légèrement apprécier l'établissement où il se trouvait car cela lui permettrait d'enfin trouver des gens intéressants. Il n'avait pas bien saisit la manière dont elle avait réussi à se sortir de son piège végétal mais c'était surtout voir le comportement étrange des animaux qui formaient un rideau coloré qui fut le plus étonnant à voir. Tendant légèrement une main il laissa un petit papillon bleuté se poser sur son index et le regarda un petit moment avant que l'insecte ne décolle une nouvelle fois en laissant une petite poudre sur son doigt. Il souffla légèrement pour la faire partir et regarda de nouveau la jeune femme alors que celle-ci s'approchait de lui. Il ne bougea pas d'un millimètre et pu constater en croisant son regard que la jeune femme rousse avait retrouvé son calme, du moins en apparence car il n'en savait rien. Après tout lui-même pouvait paraître calme tout en bouillonnant intérieurement d'une rage immense. Il devait faire attention, il devait se méfier de tout le monde car à présent il n'avait plus affaire à des gens normaux, des humains faibles comme ses parents. Il ne pouvait pas jouer avec eux en exerçant le pouvoir de la peur, il allait devoir trouver un autre moyen car il était hors de question qu'il ne cesse de s'amuser. Il ne jetait pas de suite un regard à la jeune femme mais plutôt à son oeuvre derrière elle, sa prison de lianes qui ne retenait plus rien. Claquant des doigts, celle-ci se mit à faner avant qu'une rafale de vent de la transforme en poussière qui s'éparpilla un peu partout dans le parc comme si tout cela n'avait jamais existé. Éphémère, comme toujours, il refusait de laisser les autres mortels voir ses créations, ce n'était pas possible que leurs yeux impurs puissent découvrir ce genre de beauté. Puis je me penchais légèrement vers la jeune femme pour essayer de comprendre en lisant dans son regard de quelle manière elle avait réussi à se libérer... Mais rien, ses yeux rouges soutenaient les siens, glacés, sans aucune difficulté. Elle ne le craignait pas... Cela lui changeait grandement de son entourage mais il ne supportait pas avoir de la résistance devant lui, elle finirait par s'écraser car il n'allait pas lui laisser le choix. Quand elle arriva enfin à la hauteur de l'homme après avoir détaché la sublime rose posée délicatement dans ses cheveux roux, elle tapa dans un geste fluide mais rapide la fleur couleur sang sur le torse de Steve avant de lui adresser la parole. Un léger sourire amusé se dessina sur les lèvres fines de l'anglais, ne montrant qu'un léger amusement hautain.

"Et pensez-vous vraiment que je sois capable de me reprocher la moindre chose? Jamais mademoiselle Boyle, retenez cela."

Steve n'était pas du genre à avoir des remords sur ses gestes, il avait fait tellement de choses impardonnables qu'il n'avait plus peur de se salir les mains et se moquait bien de ce que pouvait dire la jeune fille. Malgré tout, il allait retenir son nom, il n'allait pas l'oublier. Il saisit avec une douceur qu'il ne voulait pas sa main dans laquelle se trouvait la rose et effleura un pétale abîmé par le léger choc qu'il avait subit pour que la fleur puisse retrouver tout son éclat d'antan. Il se pencha ensuite vers elle pour mieux la détailler. Elle l'intriguait vraiment depuis son petit tour de magie et il allait tout faire pour savoir la manière dont elle s'était libéré tant cela le rendait curieux. Il posa un genou à terre dans les graviers blancs et, tenant toujours sa main, l'effleura d'un baiser avant de se redresser pour susurrer à son oreille :

"Je suis enchanté de vous rencontrer mademoiselle Boyle, mais pour être certain que vous n'oubliez guère que je ne suis pas un homme à avoir une résistance devant lui, laissez moi me présenter."

Sans lui laisser le temps de faire quoi il la saisit par la taille et la fit basculer en arrière pour l'empêcher de bouger, prenant soin qu'elle ne tombe pas et se pencha vers son visage jusqu'à sentir une nouvelle fois sa respiration régulière effleurer sa peau glacée. Il espérait par ce geste que la jeune femme se trahisse et ne dévoile sa véritable force qui lui avait permis de se libérer de sa cage florale. Il chuchota tout de même d'une voix mielleuse :

"Je suis Lord Steve Richard."

Le jeune anglais ne résista en rien quand elle montra le signe qu'elle voulait se redresser et il la laissa faire en reprenant sa position initiale, c'est à dire droit comme un i en la regardant dans le silence le plus absolu. Il croisa ses bras sur son torse comme pour se donner une certaine contenance sans la lâcher des yeux en affichant un léger sourire amusé bien que son esprit était ailleurs. Elle semblait s'amuser de ses propres gestes et même si cela l'agaçait légèrement, il n'en montra rien alors que ses yeux émeraudes ne renvoyaient que le regard glacé à la jeune femme. Il n'était pas du genre à faire des cadeaux à quelqu'un qu'il ne connaissait ni d'Adam ni d'Eve et la seule raison pour laquelle il pouvait montrer le moindre sentiment que l'on pourrait qualifier de positif était la pitié. Fort heureusement (ou pas) pour la jeune femme, ce n'était pas le cas. En effet l'étincelle dans son regard écarlate l'intriguait trop pour qu'il ait le temps de ressentir cette émotion. Quand elle lui adressa la parole sur un ton sûr, ses lèvres fines se pincèrent imperceptiblement. Ses questions semblaient être une liste de reproches à son sujet comme si cela devait le faire culpabiliser ou autre, mais en tout cas ce n'était pas dans son genre. Il voyait l'image ainsi l'image que la jeune fille avait de lui, cela n'était vraiment pas glorieux en effet. Cependant il n'allait rien faire pour essayer de l'arranger car c'était le meilleur moyen de ne pas se faire approcher des gens qui ne le méritaient pas. Elle se recula avec lenteur et il ne la lâchait pas du regard alors que chacun de ses pas dans le gravier blanc rythmait la scène et brisait le doux silence qui s'était installé. Steve resta un long moment sans bouger ni dire quoi que ce soit alors qu'elle s'installait tranquillement sur le banc en jouant avec la rose couleur sang qu'il lui avait en quelque sorte offert. Il s'appuya de nouveau le dos contre l'écorce de l'arbre, plissant un instant les yeux quand un rayon de soleil le gêna, puis plaça sa main pour protéger ses yeux verts et ainsi mieux voir la jeune fille sans plus de difficulté. Il fut une nouvelle fois intrigué quand elle sembla parler à un oiseau qui s'était posé non loin de là et celui-ci s'envola pour se poser sur le bras de l'anglais. Il croisa le regard de la femme et repoussa l'oiseau d'un air mauvais, lui faisant peur pour qu'il quitte son perchoir improvisé à tire-d'aile. Il n'aimait pas les animaux, il n'aimait pas les insectes. Il ne se sentait bien qu'en présence de plantes et se plaisait à les faire revivre et ainsi leur rendre toute leur beauté que les humains ont oublié.

"Magnifique image que vous avez de moi mademoiselle Boyle. Je suis ravi d'être vu ainsi même si je pense que vous vous méprenez pour le respect envers la gente féminine."

Il décolla enfin son dos de l'arbre qui lui faisait un petit abri du soleil et s'approcha du banc sur lequel se trouvait la jeune femme sans s'y asseoir, la surplombant ainsi de toute sa taille. Il croisa une nouvelle fois les bras sur son torse et se pencha vers elle avec un sourire léger bien que son regard émeraude restait de glace :

"Mon coeur est aussi froid que la glace pour ceux qui ne me connaissent guère et certes, je refuse que quiconque agisse contre ma personne. C'est pour cela que je vous serai gré de ne plus employer de mots dont vous ne connaissez guère la véritable signification car je ne suis point barbare de part mon apprentissage."

En effet, il n'avait pas tort. Avant que le terme de barbare n'entre dans le langage courant pour désigner le caractère cruel et vulgaire d'une personne, cela représentait toutes les personnes qui venait d'un pays étranger et n'en parlant pas la langue maternelle. Et le jeune anglais avait eut de nombreux professeurs durant son enfance qui s'étaient démenés pour lui apprendre plusieurs langues et ainsi lui permettre, car cela était le but de ses parents, de régler plus aisément les différents conflits linguistiques dans ses futures entreprises. Vaniteux, il se pencha vers elle d'avantage pour susurrer à son oreille:

"Et je dois être celui qui se rapproche le plus de la perfection."

Il restait si près de son visage qu'il sentait sur sa peau la respiration régulière de la jeune femme. Il ferma un court instant les yeux pour prendre une rapide inspiration, profitant ainsi des effluves florales qui embaumaient tout le parc, et les rouvrit pour croiser son regard écarlate avant qu'elle ne le repousse avec délicatesse pour pouvoir se lever du banc. un court moment passa une fois qu'elle fut debout et elle s'adressa à lui sur un ton où il pouvait déceler une pointe de moquerie, ce qui ne l'enchanta guère car il ne pouvait pas supporter de voir une lueur d'amusement dans le regard de ceux qu'il croisait et n'avait qu'une seule envie plus que violente ; les étrangler sans autre forme de cérémonie jusqu'à voir la vie quitter leur regard. Les paroles qu'elle se plu ) ressortir étaient très proches des siennes et un fin sourire se dessina sur ses lèvres même si cela ne l'amusait pas le moins du monde de voir une certaine résistance dans le regard de la jeune femme. Malgré tout ses paroles étaient correctes du point de vue de toute personne censée et même si Steve n'aimait pas s'entendre dire ce genre de choses, il devait avouer qu'elle avait une certaine manière d'affirmer son jugement. Le jeune homme n'aimait absolument pas voir dans son regard qu'elle ne le craignait pas car il aimait exercer son pouvoir dans la peur et parfois même... La douleur. Mais mieux valait pour lui comme pour elle qu'il ne pense à cela car il devait garder son calme le plus absolu et ne rien dévoiler dans ses yeux émeraudes. Elle m'interrogea de nouveau mais cette fois ses questions semblaient plus personnelles et l'entendre appeler l'homme par son prénom le fit froncer les sourcils.

"Je ne vous permets guère non."

Il ne lui laissa pas le temps de s'installer tranquillement que la phrase avait fusé, il refusait de voir les gens prononcer son nom, sa haute lignée lui avait donné un titre, ce n'était pas pour qu'il soit bafoué par des lèvres faisandées. Elle semblait vouloir discuter avec lui alors qu'il ne demandait à profiter de la nature et de la douce atmosphère du parc seul. Il allait avoir des difficultés à se débarrasser de la jeune femme calmement. L'anglais la regardait faire, tourner en rond comme un lion en cage alors qu'il gardait son masque de silence. Elle s'occupait tranquillement de sa coiffure alors qu'il continuait de se tenir droit comme un I, ne lui lançant plus aucun regard quand elle s'approcha de l'arbre pour se laisser aller dans l'herbe moelleuse dont quelques gouttes de rosée brillait au soleil. Elle semblait presque lui donner enfin l'autorisation de parler, comme si il allait lui obéir ainsi. Croisant une nouvelle fois les bras sur son torse, se forçant à se détendre, il se tourna de trois-quart vers elle pour la regarder mais ne dit absolument rien et ce, durant un très long moment. Il était après tout hors de question de lui montrer un signe de faiblesse. Son regard vert profond était toujours aussi glacé, comme si il n'avait aucun sentiment. Après tout il n'était pas du genre à se dévoiler comme ça devant des gens qu'il ne connaissait pas. Ses lèvres se pincèrent d'une manière imperceptible puis il fit un pas vers elle sans pour autant se pencher à son niveau, s'abaisser à elle. Il n'allait tout de même pas lui dévoiler la vérité sur sa présence ici, il n'allait tout de même pas lui dire qu'il était gravement malade et que ce poison était en rapport avec son pouvoir qui progressait de manière quasi incontrôlable. Lui qui avait fait tant de recherche pour devenir plus puissant était débordé par la situation mais refusait d'avoir de l'aide et il devenait de plus en plus difficile pour lui de manipuler ce don qu'il avait pour certaines actions.

"Disons... Mademoiselle Boyle, que l'on m'a convié à venir pour une certaine raison qui ne vous concerne absolument pas mais une fois ce léger problème réglé, je peux vous assurer que ma présence ne vous gênera plus."

Il donnait après tout l'impression de manipuler son pouvoir à merveille pourtant tout n'était qu'une illusion. Il se sentait comme une fleur fanée lorsqu'il se trouvait trop éloigné de plantes, ce n'était donc pas un plaisir pour lui de se trouver dans ce parc mais presque un besoin naturel. Il devait exercer sur lui-même un grand contrôle mental pour réussir à maintenir cette force exceptionnelle qui pouvait transformer ce jardin en forêt s'il s'énervait ou ressentait une joie. C'était pour cela qu'il se refusait d'avoir des sentiments dits humains et qu'il ne montrait qu'une face glacée de lui-même. Par simple politesse surement, il finit après un court instant de réflexion par demander à la jeune femme :

"Et vous? Serait-il possible de connaître la raison de votre présence dans un endroit tel? Quelle force cachez-vous en vous?"